Le remède ultime ?!

Bon je vous préviens tout de suite, aujourd'hui ça va parler serious business et ça va pas rigoler,, parce qu'aujourd'hui on va causer d'un de mes auteurs préférés : Tetsuya TSUTSUI! Et pour ça, quoi de mieux que de se pencher sur sa dernière oeuvre en date, la dénommé..... *roulements de tambours* POISOOOON CITYYYYY!! Euheum... je me calme oui.

 

 

"Poison City" est une oeuvre en deux tomes, signée Testsuya TSUTSUI et développée directement en collaboration avec les éditions Ki-oon (cocoricooo). Le premier volume est paru en mars 2015, simultanément dans la collection "Lattitude" de l'éditeur (avec de grandes pages pour pouvoir admirer les dessins) mais aussi dans un format plus "traditionnel" pour les plus... pauvres (tu la sens ma douleur?). Certains s'en rappellent peut-être, mais j'avais déjà fait une chronique à propos du tome 1 au moment de sa parution. Je n'ai malheureusement pas pu vous parler du second volume à cause de la longue pause du blog, c'est pourquoi je vous fait aujourd'hui une chronique "récapitulative", sur l'ensemble de l'oeuvre une fois aboutie.

 

En 2019, alors que le monde entier se tourne peu à peu vers Tokyo, ville organisatrice des prochains jeux olympiques d'été, une vague de censure vient frapper le Japon. Tout doit être lisse à souhaît à l'approche de cet évènement qui attirera les foules. Le moment est peut-être donc mal choisi pour Mikio Hibino, mangaka en herbe, de tenter la publication de son premier manga. D'autant plus qu'il n'est jamais facile de publier un manga jugé (trop) violent, dans ce climat hostile.

 

"Poison City" se présente donc comme une oeuvre d'anticipation. En soi le mécanisme est simple, Tsutsui utilise un trait de nos sociétés (la censure en l'occurence), qu'il exagère, ou du moins dont il imagine l'évolution, de manière à donner vie à une société malheureusement probable où la liberté d'expression ne serait plus qu'un fardeau pour les autorités. C'est dans ce contexte que nous suivrons le péripéties de Mikio et de sa série, aux prises avec des comités de censure tout puissants. Le seul moyen de se défendre sera de leur faire directement face par les idées. En nous présentant plusieurs personnages portant chacun une rélféxion particulière, l'auteur nous propose tout un panel de points de vues sur la question. Vaut-il mieux privilégier la création quitte à offenser à coup sûr quelqu'un? Ou alors est-il plus raisonnable de réguler tout ça dans un souci de respect, quitte à engendrer une dérive de la censure? Nous retrouvons une pluralité d'opinions sur ce sujet, tous digne d'un certain intérêt, et qui ne manqueront pas de soulever les bonnes questions. C'est avant tout une réflexion apportée de manière abile par de multiples procédés que nous offre "Poison City".

 

L'oeuvre bénéficie pour appuyer son propos de plusieurs niveaux de lecture (d'où le "de manière abile" juste au dessus, tu piges?). Avant tout, il faut savoir que le récit comporte une part autobiographique. Bien entendu, le tout est enrobé d'énormément de fiction mais il n'empêche que Tetsuya Tsutsui a lui-même été victime par le passé de censure dans une certaine région du Japon (tout ceci est expliqué plus en détail en fin de volume). Le récit est donc très partiellement autobiographique dans le sens où l'auteur s'inspire de son vécu pour nous raconter cette histoire, ayant pour effet d'ajouter à l'oeuvre une certaine poigne. Ensuite, en plus du scénario qui lui-même nous invite à la réflexion, "Poison City" use d'une subtile mise en abîme de sa trame principale à l'intérieur du manga du héros (ouai relis-la peut-être deux fois cette phrase, ça te fera pas de mal). À travers "Dark Walker" (le manga du héros), la censure est comparée à une épidémie morbide donnant aux gens des pulsions cannibales. On peut d'ailleurs voir cette "histoire dans l'histoire" comme le vrai ressenti de l'auteur, une prise de position au milieu d'un scénario global plus lisse.

 

 

Tetsuya Tsutsui signe "Poison City" de sa patte d'artiste engagé et nous offre une bouffée de saveurs et de sentiments sur un fond de critique sociale follement prenante. C'est poignant et plein de sens pour nous, lecteurs assidus de mangas, mais aussi plus généralement pour quiconque aurait le malheur de vivre dans notre société. La frustration ne manquera pas de se faire ressentir face aux contraintes totalement absurdes imposées par un comité de censure tout puissant, faisant monter la tension tout au long de l'oeuvre pour terminer en apothéose sur un bouquet final savoureux. On sent que l'auteur ne se prive pas de défendre sa propre opinion et parfois même de caricaturer les puissants pour nous offrir une morale forte, prenant un parti totalement assumé. Tout cela pour terminer finalement sur une conclusion intelligente, pleine de sens et qui ne manque pas de faire son effet. Pleine de sentiments, d'intelligence et de puissance, Tetsuya Tsutsui ne manquera pas de vous toucher avec cette oeuvre grandiose!

 

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