Le crush de la semaine : Mushishi
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Gros succès au moment de sa sortie, Mushishi est sans conteste une oeuvre de très grande qualité, considérée comme un chef d'oeuvre par beaucoup. Bien que reconnue de tous, il faut dire que l'on en entend pas énormément parler actuellement. Pour ceux qui comme moi arrivent après la bataille ou pour les fans qui n'oublient jamais, voici ce que c'est Mushishi.
Publiée entre 1999 et 2008 au rythme d'environ 1 volume par an dans le Monthly Afternoon de la Kôdansha, la série compte aujourd'hui un nombre total de 10 tomes (1/an entre 1999 et 2008, ce qui nous fait 10... le compte est bon). Forte de son succès, la série a eu droit à une adaptation anime de 26 épisodes entre 2005 et 2006 et d'une seconde saison de 20 épisodes l'année dernière. Un film live a même vu le jour en 2007, réalisé tout de même par... THE Katsuhiro Otomo qu'on ne présente plus! C'est au cours de cette même année que les éditions Kana ont enfin commencé la parution du manga en version française, qui s'est terminée il y a maintenant 6 ans (2015-2009, ce qui nous donne 6... le compte est bon!). A noter qu'un film d'animation est prévu pour cet été!
Imaginez que votre main représente le vivant, chaque doigt représenterait les animaux et le pouce représenterait les plantes. Les humains, eux se trouveraient au bout du majeur, l'endroit le plus éloigné de la Terre. A l'intérieur de la main se trouveraient les créatures moins évoluées, jusqu'au niveau du poignet où les veines ne forment plus qu'un : c'est là que se trouveraient les bactéries et les microbes. Mais il y a des créatures encore plus bas que cela, même plus loin que l'avant-bras ou le coude. Et les créatures qui se trouvent là-bas sont appelés "mushi". Ils sont très proche de l'essence de la vie tant leur forme et leur existence sont vagues.
Seul très peu de gens sont capables de voir ces mushi et c'est le cas de notre héros, Ginko. Il est un mushishi, ce qui signifie qu'il a décidé de consacrer sa vie à l'étude des mushi et des phénomènes qui y sont liés. Pour cela, Ginko voyage à travers le pays, de villages en villages au gré de ses envies, à la rencontre de personnes parasitées par ces bestioles. Nous découvrirons de nombreuses pathologies provoquées par les différents mushi, toutes plus farfelues et intéressantes les unes que les autres. Dans un format un chapitre = une aventure, nous ferons la rencontre d'une cinquantaine de cas différents au cours de la série, entraînant toujours une histoire fantastique et un réflexion profonde.
Dans l'univers de Mushishi, tout a une explication liée aux mushi. Vous marchez en dormant? Ce n'est pas du somnambulisme, c'est la faute d'un mushi! Vous avez une maladie inconnue de tous? C'est la faute d'un mushi! Vous avez des troubles de la mémoire? C'est encore un mushi! Bref, Mushishi nous faire voir le monde sous un autre angle. Nous redécouvrons la vie à travers une atmosphère écologiste typique du Japon rural d'autrefois, nous ramenant à une époque où tout était si simple. C'est un réel plaisir de voyager dans ce monde magique et naturel, nous octroyant un retour aux sources rafraîchissant.
Les rares personnages récurrents sont finalement très peu approfondis, nous ne savons que le stricte minimum sur leur passé, laissant un voile de mystère planer sur l'oeuvre. Il faudra attendre un peu avant d'en connaître plus sur notre héros. Ce qui est important dans Mushishi c'est la personnalité des protagonistes, que nous découvrons simplement en passant du temps avec eux puisque ce qui compte c'est avant tout l'histoire. En effet, l'histoire, ou plutôt les histoires cherchent constamment à nous mener vers une quelconque réflexion, mais nous reviendront plus tard sur ce point. Malgré une trame scénaristique très redondante, Mushishi ne tombe jamais dans la monotonie et nous offre lors de chaque nouvelle fable une intrigue toujours aussi intéressante, intrigante et prenante.
Pour cela, l'auteure bénéficie d'un coup de crayon tout aussi particulier que son manga, rendant l'oeuvre unique. Ce trait presque crayonné et tremblant qui peut rebuter aux premier abord colle finalement parfaitement avec l'univers décalé de l'histoire. Si vous voulez un exemple, prenons "l'Attaque des Titans" : au premier abord le style graphique vous avait sûrement étonné et même peut-être gêné, mais finalement avec le temps le trait n'est plus vraiment un problème, il ajoute même un petit quelque chose de particulier à l'univers. Et bien pour Mushishi c'est exactement là même chose (sauf que ça parle pas de titans). Finalement, ce dessin à la fois brouillon et plein de détails apporte quelque chose d'unique et d'indescriptible à l'atmosphère de l'oeuvre, nous immergeant à chaque lecture dans un monde complètement à part et hors du temps.
Toutes les aventures de Ginko nous sont racontées de façon concise, allant droit au but à la manière de fables ou de contes. Et comme toute fable, l'objectif est de nous faire réfléchir. En nous transportant dans cet univers farfelu, l'auteur cherche à nous faire rêver pour mieux nous amener à la réflexion mais aussi simplement à nous communiquer un sentiment. Les histoires peuvent aller de la plus charmante à la plus dure mais se soldent sans cesse par une morale. En effet, il n'y a pas de tabous dans Mushishi, l'auteur navigue sans soucis dans un cadre pouvant parfois être assez glauque et violent psychologiquement. Tout cela est néanmoins abordé de manière très mature, traitant chaque sujet avec un recule nécessaire à la réflexion.
Les mushi servent finalement de métaphores, nous faisant réfléchir à toute sorte de question en imageant le sujet. Le cadre naturel va quant à lui bien plus loin qu'un simple décor puisqu'il est le biais par lequel se déroule chaque intrigue, se retrouvant constamment au centre du problème pour nous rappeler, nous pauvre contemporains de la mondialisation, aux sources de la vie. Très souvent, l'auteur cherche seulement à nous communiquer un sentiment simple tel que l'espoir ou la mélancolie mais finalement c'est toujours le même résultat puisqu'une fois n'importe quelle histoire terminée, nous nous retrouvons bouche bée, de nombreuses questions en tête et une sensation étrange qui nous traverse le corps.
En arrivant à allier court et intriguant, cette oeuvre nous offre un condensé de rêve et de réflexion. L'auteur sait comment s'y prendre pour nous servir une oeuvre raffraichissante, nous laissant nous évader bien plus loin que le cadre bien fermé du manga populaire. Yuki Urushibara réinvent finalement la traditionnelle histoire de grand-mère en l'adaptant au manga. Tu peux remballer tes histoires Père Castor, on a trouvé mieux!